Après une quinzaine de jours de soubresauts, « les ministères concernés » valident les « mesures barrières » proposées par des organisations patronales et des syndicats de travailleurs contenues dans le Guide de préconisations de sécurité sanitaire pour la continuité des activités de la construction en période d’épidémie de coronavirus COVID-19, publié le 2 avril par l’OPPBTP.
RésoA+, comme la plupart des organismes impliqués dans la défense des enjeux de santé publique, accueille avec intérêt le fruit de cette collaboration, tout en regrettant que les acteurs de la maitrise d’oeuvre, du diagnostic, de la coordination de la sécurité et de la prévention de la santé, voire ceux de la maitrise d’ouvrage ou des donneurs d’ordre n’aient pas été associés.
Ayant noté que les ministères souhaitent lancer une concertation complémentaire pour décliner ces dispositions d’ordre général dans l’ensemble des situations de chantiers, les membres de RésoA+ sont disposés à décliner les préconisations pour des opérations si particulières que sont celles de la décontamination, de la dépollution ou du désamiantage.
C’est pourquoi, sans attendre, RésoA+ a mis en place une Cellule de Crise Opérationnelle composée des membres du Conseil d’Administration réunis en Comité Permanent, de membres adhérents volontaires et de divers invités. La Cellule se réunit depuis le 25 mars toutes les 48h afin d’acter les synthèses des divers groupes de travail mis en place.
Des contacts ont été pris avec diverses autorités publiques ou professionnelles afin de mener un travail de synthèse.
Trois premiers constats ont pu être menés le vendredi 3 avril.
- Le Guide OPPBTP mentionne qu’une attention particulière doit être portée sur tous les risques traditionnels des chantiers, et en particulier les risques de chute, de heurt, ceux liés à l’électricité, aux engins, aux produits chimiques » sans toutefois citer expressément les risques principaux encourus dans les travaux sur existants en présence de polluants particulaires comme les fibres d’amiante, les particules de plomb, les poussières de silice cristalline.
- le Guide OPPBTP introduit un nouvel acteur dans le paysage du chantier, à savoir le « référent Covid-19« , désigné par le Maitre d’Ouvrage, voire par les entreprises intervenantes, et par extrapolation par tout « donneur d’ordre » dans l’esprit de l’évaluation générale de risques, y compris sur les chantiers en site occupé, dans une entreprise utilisatrice ou chez le particulier. Or le statut de ce préventeur centré sur la lutte contre la COVID-19 n’est par défini.
- Le Guide évoque les diverses situations de port de maques anti-projections ou de protection respiratoire. Or certaines prescriptions semblent contradictoires avec celles émises par d’autres guides ou notes portant spécifiquement sur ce sujet sensible, et notamment sur l’usage de masques à soupapes expiratoires. Par ailleurs, aucune pubication scientifique sérieuse sur les caractéristiques du virus ne permet de connaitre les valeurs de sa bio-persistance et de sa virulence en cas de projections sur des surfaces présentes dans un immeuble bâti, rendant ainsi aléatoires les prescriptions de désinfection.
Face à ces constats, RésoA+ émet les propositions suivantes:
- La reprise ou l’ouverture de chantiers de bâtiments, comme les opérations de maintenance, d’entretien, de remise en état après sinistre, ou encore les interventions de décontamination ou de désinfection des installations fixes ou mobiles indispensables au respect des conditions d’hygiène et de sécurité, n’est envisageable, quelque soit l’importance ou la durée des opérations, qu’en l’absence de tout risque biologique ou chimique.
- > De facto, les donneurs d’ordre devront veiller à ce que les intervenants disposent d’un Dossier de Traçabilité Amiante mis à jour avant tout démarrage d’activité. En cas de besoin, il est de leur responsabilité de faire procéder à des investigations approfondies complémentaires afin de s’assurer de l’absence d’amiante dans le périmètre de travaux. Le cas échéant, les interventions seront déclarées « hors champ ».
A défaut, les entreprises seraient alors autorisées à requalifier les interventions sous le régime de la « sous-section 4 », voire si nécessaire en « sous section 3 », à l’occasion de retrait important même partiel, de parties d’ouvrage amiantines.
- > De facto, les donneurs d’ordre devront veiller à ce que les intervenants disposent d’un Dossier de Traçabilité Amiante mis à jour avant tout démarrage d’activité. En cas de besoin, il est de leur responsabilité de faire procéder à des investigations approfondies complémentaires afin de s’assurer de l’absence d’amiante dans le périmètre de travaux. Le cas échéant, les interventions seront déclarées « hors champ ».
- La lutte contre la propagation de la COVID-19 est l’affaire de chacun des intervenants. Pour harmoniser et optimiser les mesures barrières imposées pour chacune des situations de chantier, chaque catégorie d’acteurs devrait désigner un.e « Référent.e COVID-19 ». Ainsi, la conception et la mise en œuvre du Plan de Reprise et de Continuité de l’Activité des chantiers pourraient être adaptées et mieux supportées par les compagnons et leurs encadrants.
- > RésoA+ demande la mise en place d’un Centre National de Ressources Pédagogiques et la programmation de sessions de formation accéléréedes personnels désignés pour assumer le rôle de Référent CODIV-19 sur la base de données validées par un comité scientifique indépendant, prenant en compte les récentes données relatives à la bio-persistance du SARS-Cov2 projeté dansl’environnement, sur les surfaces présentes sur les lieux de travail et y compris dans les locaux sanitaires potentiellement contaminés par les effluents des travailleurs ou des personnes confinées dans leurs domicile.
- Enfin, dans un courriel envoyé le 31 mars à la cellule de crise du ministère des finances, RésoA+ interpelle les autorités sur l’inefficience de la réquisition des masques FFP2 et FFP3 à soupapes.
- Comme le rappelle dans son §3 la recommandation AFNOR S76-001 MASQUES BARRIÈRES Guide d’exigences minimales, de méthodes d’essais, de confection et d’usage publié le 27 mars 2020, « Un masque barrière couvre le nez, la bouche et le menton (zone de protection voir Figure 1) et il ne doit pas comporter des soupape(s) inspiratoire(s) et/ou expiratoire(s). Les masques FFP2 ou FFP3 sans soupapes existent et peuvent donc satisfaire plus largement le besoin de barrière anti-projection.
- Par ailleurs, on comprendra que les masques à soupape ne peuvent protéger les porteurs d’une projection aléatoire venant pénétrer dans la valve et migrer par capillarité à l’intérieur du masque porté de manière continue durant une demi journée. Pire, un porteur contaminé mais asymptomatique se croyant protégé des projections, risquerait à son insu de contaminer un patient ausculté ou soigné, par l’expiration d’un air contaminé.
- > C’est pourquoi, après consultation des milieux professionnels, nous sollicitons votre attention sur l’inefficience de la mesure de réquisition des masques FFP2 et FFP3 à soupapes.
- A l’heure où les professionnels du BTP s’engagent vers la reprise de certains chantiers; nous souhaitons donc recevoir de votre de part une position nous permettant de rassurer ces professionnels mobilisés pour accompagner la remise en état des installations, appareillages, immeubles bâtis et autres équipements indispensables à la poursuite des activités indispensables à la vie de la Nation.
- Le cas échéant une exclusion des masques FFP2 ou FFP3 à soupapes de la liste des appareils de protection respiratoires figurant à l’article 12 du décret 2020-293 du 23 mars 2020 satisferait les attentes des professionnels concernés, tant par la protection des personnels de santé que de celle des techniciens de la maintenance
En absence de bilan satisfaisant et de plan de prévention consensuels prouvant la maitrise concomitante de tous les risques biologiques et chimiques, il apparait impossible de garantir un niveau satisfaisant de salubrité sur quelque chantier que ce soit.
Toutefois, RésoA+ appelle ses membres à mobiliser leurs moyens matériels et humains pour poursuivre ou reprendre, dès que possible, leurs activités respectives et à partager ce communiqué auprès de leurs carnets d’adresses.
Deux adresses courrielles spéciales sont mis à leur dispositon:
- en cas de besoin de signaler des abus ou demander un appui particulier lors d’un litige avec un tiers: mediations@resoAplus.fr
- en cas de volonté de communiquer sur une solution innovante, une question relative à l’enjeu de santé publique dans son secteur de compétence: cco.onra-20@resoAplus.fr
Enfin, RésoA+ dispose d’un profil LINKEDIN et propose à tous ses membres désireux de participer la co-construction de leur veille technique, réglementaire, financière de participer au Groupe Répertorié « OBSERVATOIRE NATIONAL DE LA REMÉDIATION AMIANTE«
Pour RésoA+
Luc BAILLET, secrétaire, animateur de la Cellule ce Crise Opérationnelle.